Couleurs et émotions dans la physiognomonie des XVIe et XVIIe siècles
Abstract
Aux XVIe et XVIIe siècles, la physiognomonie continue de s’appuyer sur des corpus anciens mais elle renouvelle également en partie ses modalités gnoséologiques et épistémologiques. La place dévolue à la couleur et aux émotions dans ce corpus manifeste les permanences et les mutations du regard de la Renaissance à l’âge classique. Deux tendances coexistent, la seconde tendant à l’emporter sur la première au fil du temps. La physiognomonie astrologique médicale traditionnelle repose sur l’étude des signes radicaux. Elle dresse des typologies et des caractérologies stables, s’appuyant sur un chromatisme restreint. La physiognomonie anatomo-pathognomonique, quant à elle, s’intéresse de plus en plus au mouvement, à l’écart et aux signes accidentels. L’ambiguïté sémiologique constitutive de la couleur en fait le support de l’expressivité des passions et de l’individualisation progressive de l’émotion. On assiste ainsi à un élargissement de la palette conceptuelle et colorée de la physiognomonie. Couleurs et émotions manifestent la transformation des fonctions traditionnelles de la physiognomonie et son fléchissement pathognomonique. L’article aborde d’un point de vue philosophique ce moment clef de l’histoire des représentations du corps et interroge les articulations conceptuelles en jeu.