Les emprunts dans le vocabulaire français. Inventaire et analyse
Abstract
Il est malaisé de faire un compte précis du vocabulaire français. L’approche la plus naturelle consiste à ouvrir le dictionnaire et à faire le relevé des entrées. Mais quel dictionnaire choisir ? Et, pour un même ouvrage, quelle édition ? La nomenclature est variable selon la chronologie, selon le public visé, selon que l’intention est encyclopédique, historique, normative ou simplement utilitaire. Même les ouvrages les plus sérieux sont soumis à des impératifs extrascientifiques et à la nécessité commerciale d’économiser la place. Quand un dictionnaire procède à une mise à jour, il met en avant les entrées nouvelles mais reste généralement discret sur les mots qu’il a fallu sacrifier, comme étant vieillis. Sans cet équilibre entre les pertes et les gains, le volume imprimé grossirait indéfiniment . Mais il y a quelque arbitraire dans la condamnation des mots. S’il est facile de repérer les mots nouveaux dans la rue ou dans les journaux – car leur apparition inattendue force l’attention –, il est plus difficile de capter le silence dont s’entourent les mots absents que l’usage abandonne. Il y a une asymétrie entre les naissances lexicales et les décès. La naissance des mots est ponctuelle, datée, repérable et inscrite – même si c’est à retardement – dans les registres, alors que la mort des mots est lente, insensible et ne donne lieu à aucun avis de décès. Les mots que la langue et les dictionnaires déposent comme des alluvions sur la rive du temps sont-ils vraiment morts à jamais ? Pour peu qu’on les rencontre dans un texte ancien ou sous la plume d’un lettré, ils parlent encore à voix basse, et sous la cendre survit une lueur de sens.
On se propose de conduire une enquête statistique sur l'origine des mots français. Loin de discuter les conclusions que livrent les dictionnaires sur l'étymologie, on accepte leurs propositions, en se bornant à les recenser. Diverses sources sont exploitées, principalement la BHVF (Base Historique du Vocabulaire Français, en 50 volumes), le Petit Robert ( à partir du cédérom) et le TLF (dans sa version Internet). A partir de relevés établis selon la date de l'emprunt, la langue source de l'emprunt, la discipline intéressée, la catégorie grammaticale de l'emprunt et même la composition graphémique du mot (ce qu'on pourrait appeler son faciès), l'étude procède à des croisements qui illustrent les mouvements du vocabulaire français au cours de l'histoire.
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